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Géopolitique humanitaire de la santé.

Géopolitique humanitaire de la santé.


Premier constat : les pays les moins développés sont les moins bien lotis en matière de santé.

En matière d’accès aux soins, tous les pays ne sont pas égaux, et cela est notamment dû à l’état dans lequel leurs systèmes de santé se trouvent. Avant d’aller plus loin, définissons ensemble ce qu’est un système de santé. Pour l’Organisation Mondiale de la Santé, les systèmes de santé sont l’ensemble des organisations, des institutions, des ressources et des personnes dont l’objectif principal est d’améliorer la santé. En d’autres mots, un système de santé est constitué de six éléments :

  • Le personnel de santé, c’est-à-dire l’ensemble des médecins, des infirmiers, des brancardiers et toute autre personne habilitée à travailler dans un hôpital, une clinique ou un centre de santé,
  • Les médicaments et tous les produits destinés à soigner les patients,
  • Les infrastructures, c’est-à-dire les bâtiments qui abritent le personnel médical et permettent que les soins soient dispensés dans un lieu sûr et protégé pour les patients,
  • Le système d’information sanitaire et d’alerte épidémiologique, qui permet de surveiller l’apparition et l’évolution des maladies au sein de la population,
  • La gouvernance de la santé, c’est-à-dire les pratiques en matière de santé qui sont appliquées à partir d’une stratégie précise et mises en œuvre par les différents acteurs médicaux,
  • Et enfin le financement de la santé, qui permet de former de nouveaux travailleurs médicaux, de les rémunérer ou d’assurer l’approvisionnement en médicaments.

Malheureusement, force est de constater que les systèmes de santé de certains pays sont plus faibles que d’autres, et cela tient en premier lieu au sous-développement économique et social dont ces pays souffrent. Jetons par exemple un œil sur l’index du Legatum Institute de Londres, qui réalise le classement des systèmes de santé dans le monde en s’appuyant sur une cinquantaine de critères dont la couverture vaccinale, la mortalité infantile ou le nombre de médecins par habitant. Selon ce classement, la Suisse, le Japon et la Norvège sont considérés comme ayant les meilleurs systèmes de santé au monde, tandis qu’à l’inverse, des pays comme le Tchad, le Pakistan et le Laos se trouvent en bas de ce classement. Face à ce constat, il est intéressant de comparer la proportion des dépenses publiques que réalisent ces États afin de soutenir leur système de santé respectifs.

Sans surprise, on observe que la Suisse accorde 12,3% de son produit intérieur brut (PIB) pour soutenir son système de santé. Autrement dit, sur l’espace d’une année, la Suisse réinjecte dans son système de santé 12,3% du montant des richesses qu’elle crée. Le Japon alloue pour sa part 10,9% de son PIB au secteur de la santé et la Norvège 10,4%. Le Tchad, le Pakistan et le Laos, que l’on a vu comme ayant des systèmes de santé très fragiles, accordent quant à eux moins de 5% de leur PIB – respectivement 4,5%, 2,9% et 2,5%.

Ce que l’on peut en déduire, c’est qu’en allouant qu’une part résiduelle de leur PIB à leur système de santé, les pays les moins développés n’accordent inéluctablement pas les moyens nécessaires à la formation des professionnels de la santé, à la garantie de la disponibilité de matériel fiable et des médicaments essentiels, ainsi qu’à la fourniture de structures adaptées pour répondre aux urgences médicales. Et c’est bien souvent lorsqu’une crise humanitaire se déclare que ces faiblesses deviennent des facteurs qui contribuent au déclenchement d’une crise sanitaire.

Le double fardeau des crises humanitaires ou quand les crises sanitaires s’ajoutent aux catastrophes préexistantes.

Tous les contextes de crises humanitaires, qu’ils soient d’origine naturelle ou anthropique, c’est-à-dire d’origine humaine, partagent une même caractéristique : un accès aux soins réduit et un taux de morbidité élevé, ce qui veut dire qu’une même maladie est observée chez un grand nombre de personnes. En effet, une crise humanitaire qui surgit à la suite d’un séisme, d’un cyclone ou d’une guerre a systématiquement pour effet de décupler les besoins des populations en termes de soins et de suivi médical. Mais une augmentation aussi soudaine de ces besoins a également pour conséquence directe de submerger des systèmes de santé qui, dans la plupart des pays peu développés et affectés par une catastrophe humanitaire, sont déjà extrêmement faibles. C’est par conséquent dans ces contextes, qui mêlent à la fois le sous-développement du secteur de la santé et la survenance d’une catastrophe humanitaire que se déclenchent des crises sanitaires.

Il existe d’ailleurs un type spécifique de catastrophe humanitaire qui entraine systématiquement une crise sanitaire : ce sont les conflits armés. Effectivement, la conduite des hostilités lors des conflits armés a pour effet d’interrompre la pérennité des services médicaux de base et d’urgence – lorsque ceux-ci existent, et de bloquer consécutivement la capacité des États à empêcher ou ralentir la survenance d’une crise sanitaire. À ce jour, on compte des conflits armés de tailles variables sur l’ensemble du globe, et l’appel du secrétaire général de l’ONU lancé en mars 2020 en faveur d’un cessez-le-feu mondial face à la progression de la pandémie de Covid-19 vient une nouvelle fois nous rappeler que la gestion et la résolution d’une crise sanitaire ne peuvent s’effectuer que dans un environnement de paix et de stabilité.

Les conflits armés n’ont d’ailleurs pas pour seul effet de réduire l’accès aux structures de santés et aux soins, puisqu’ils sont également à l’origine de l’amplification ou du retour de maladies pourtant éradiquées avant la survenance de la guerre. En Syrie par exemple, le virus de la poliomyélite, qui provoque la paralysie des membres et dans certains cas la mort, a fait son retour dès 2013 après le début de la guerre alors que le pays n’avait pas connu de cas depuis 1999. Et au Yémen, le conflit qui oppose les milices houthis aux forces pro-gouvernementales a quant à lui contribué à la résurgence du choléra depuis 2016, une diarrhée infectieuse si extrême qu’elle peut entrainer la mort par déshydratation en quelques heures.

À cela s’ajoute les déplacements des populations qui fuient la violence des combats et qui engendrent à leur tour des situations de vulnérabilité en matière de santé. Les migrations forcées sont effectivement propices à la propagation de maladies infectieuses en raison du grand nombre de personnes qui se réinstallent dans des camps de déplacés où la densité́ de population est très forte, l’accès à l’eau potable limité et la disponibilité en nourriture insuffisante.

Il serait toutefois réducteur de ne s’intéresser ici qu’aux maladies infectieuses, puisque les situations de détresse extrêmes induites par les catastrophes humanitaires comme au travers de la violence d’un conflit armé, de la perte d’un proche ou la fuite pour survivre sont aussi de nature à créer des troubles mentaux. Le syndrome de stress post-traumatique ou la dépression sont en effet des pathologies psychiatriques qui sont communément observées dans les contextes de crise. La survenance de ces maladies mentales est d’autant plus inquiétante qu’elles perdurent même après la fin de la période de crise humanitaire, et nécessitent que les personnes qui en souffrent bénéficient d’un accompagnement psychosocial adéquat, faute de quoi il leur est difficile voire impossible de reprendre une vie normale.

Sur le terrain, les organisations humanitaires mettent en œuvre leurs programme de réponse aux crises sanitaires et les moyens dont elles disposent permettent notamment de garantir un approvisionnement stable en médicaments, mais la logique de marchandisation à outrance des industries pharmaceutiques au détriment des malades les plus pauvres continue, même encore aujourd’hui, à faire de certains médicaments des produits de luxe.

Depuis plus de 20 ans, Médecins Sans Frontières se bat pour que les malades les plus pauvres accèdent aux médicaments essentiels.

En 1999, Médecins Sans Frontières devient lauréat du Prix Nobel de la Paix, en reconnaissance du travail effectué par l’organisation auprès des victimes de catastrophes. Lors de la remise du prix, James Orbinski, le Président de MSF International en profitera pour dénoncer l’injustice dont sont victimes les malades les plus pauvres en matière d’accès à des traitements :

« Aujourd’hui, nous sommes confrontés à une injustice croissante : plus de 90 % des décès dus aux maladies infectieuses surviennent dans les pays en développement. Des patients atteints du Sida, de la tuberculose, de la maladie du sommeil… meurent parce qu’ils n’ont pas accès aux médicaments essentiels qui pourraient les sauver. Ces traitements ne sont pas disponibles soit parce qu’ils sont trop chers, soit parce que leur production a été arrêtée car elle n’était pas rentable, soit enfin parce que la recherche et le développement de nouveaux traitements sont au point mort. »

La même année, l’organisation avait en effet lancé sa campagne d’accès aux médicaments essentiels (CAME), dont le but est de dénoncer le refus des entreprises pharmaceutiques de baisser le prix de certains traitements médicaux, comme le vaccin contre le pneumocoque, responsable des cas de pneumonie et des suites desquels un million d’enfants meurent chaque année. 

La bataille dans laquelle s’est lancé Médecins Sans Frontières est un combat de longue haleine, puisque vingt ans après son lancement, cette campagne en faveur d’un accès aux médicaments à un prix juste est toujours en cours. Elle aura toutefois permis de réaliser d’importantes avancées, puisque grâce à la mobilisation sans relâche de MSF, les entreprises pharmaceutiques finiront par accepter de faire passer le prix du vaccin contre le pneumocoque de 21 à 9 dollars pour les organisations humanitaires. C’est cette campagne également qui contribuera à la baisse du coût du traitement contre le VIH, en le faisant passer de 12 000 dollars par an à un dollar par jour.

Le personnel et les soins de santé ne sont pas une cible.

La pandémie de Covid-19 est venue rappeler une vérité : Dans le monde entier, quelle que soit la nature d’une crise sanitaire, ce sont les médecins, les infirmières et l’ensemble du personnel médical qui sont sur la ligne de front. Dans les contextes humanitaires, les sages-femmes et les infirmiers sont d’ailleurs très souvent l’un des seuls recours dont disposent les communautés pour se faire soigner et pour recevoir des conseils en matière de santé. 

En plus de la charge de travail et du manque de moyens auquel il est quotidiennement confronté, le personnel de santé est également en première ligne face aux épidémies et cela constitue un véritable danger pour les soignants mal ou sous-équipés travaillant dans des pays où les systèmes de santé sont très fragiles. Lors des épidémies d’Ebola par exemple, cette fièvre hémorragique qui impose de limiter au maximum les contacts physiques avec les personnes infectées, l’Organisation Mondiale de la Santé estime que le personnel médical a entre 21 et 32 fois plus de risques d’être infecté que le reste de la population. 

Malheureusement, les dangers auxquels font face les travailleurs de santé ne se limitent pas seulement aux risques de transmissions des maladies, puisque l’on observe également ces dernières années une dramatique augmentation des attaques à leur encontre, et cette situation ne fait qu’empirer avec l’intensité des conflits armés. Face à la constante augmentation de ces attaques, Joanne Liu, la Présidente de Médecins Sans Frontières avait d’ailleurs délivré en 2016 un discours cinglant au Conseil de Sécurité des Nations Unis à l’encontre de tous les États. 

Quatre ans plus tard, et malgré l’adoption d’une résolution par le Conseil de Sécurité des Nations Unies qui rappelle que les civils et les services médicaux doivent être protégés dans les zones de conflits armés, le constat est amer. En effet, le nombre d’attaques à l’encontre des structures de santé et de leur personnel ne cesse d’augmenter, puisqu’elles sont passées de 795 en 2018 à un peu plus de 1000 (1009) en 2019. Pour l’année 2020, la situation est loin d’être meilleure et il est difficile de ne pas éprouver autant de tristesse que de dégout en pensant à l’horrible attaque qui s’est produite contre la maternité qui était gérée par MSF à Dasht-e-Barchi, près de Kaboul en Afghanistan.

Toutes ces attaques sont d’autant plus inacceptables que le droit international humanitaire, cet ensemble de règles contraignantes et de portée universelle dont le but est de fixer des limites à la guerre, interdit formellement de viser les hôpitaux et le personnel soignant. La communauté humanitaire avec le Comité International de la Croix-Rouge en tête, continue donc de militer après chaque attaque pour rappeler que ces règles s’appliquent à tous les États et tous les groupes armés. 


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