La première mission.
Ça y est, après toutes les galères traversées entre la recherche de stage puis ma vie de larbin stagiaire, il m’a enfin été donné la possibilité de partir en mission. Mes nombreux efforts étalés sur plusieurs années allaient enfin payer tandis que mon objectif professionnel était sur le point de se réaliser.
L’annonce de mon départ a été assez soudaine, puisqu’il m’a fallu préparer mes affaires en seulement trois jours avant de prendre l’avion et de commencer cette première mission d’une durée d’un an.
Une fois arrivé à l’aéroport, et au moment de passer le dernier portique de sécurité, les agents de police m’interpellent.
En cause : les 2 ordinateurs, 2 téléphones satellitaires et 3 disques durs externes que l’équipe du département logistique du siège avaient placés dans mon sac à dos afin que je puisse les remettre au reste de l’équipe sur place. De quoi éveiller quelques soupçons en effet…
Après environ dix heures de voyages – transit inclus – j’arrive sur le lieu de ma mission. Les portes de l’avion s’ouvrent. Température sur le tarmac : 45°.
À la nuit tombée, ce n’était franchement pas beaucoup mieux. Surtout que je n’avais même pas un ventilateur à disposition.
Au sein de l’équipe, j’ai très vite senti que l’ambiance était relativement tendue. Bon, je me dois tout de même de mentionner que le chef de mission avait fait l’objet d’un kidnapping (et avait été relâché au bout d’une semaine) deux mois avant mon arrivée. Alors forcément, ça n’aide pas…
Bien assez vite, il a fallu que j’assiste à mon premier cluster meeting. J’avais hâte de pouvoir représenter l’organisation pour laquelle je travaillais, échanger des informations et participer à la coordination entre acteurs humanitaires !
Mais ça, c’était avant de découvrir l’inertie de mes confrères et le manque de pro-activité des représentants des Nations Unies – pourtant en charge d’assurer la coordination entre organisations. Alors très vite, les cluster meetings mensuels sont devenus l’aspect le moins intéressant de mon job.
Dans la foulée, j’ai aussi compris qu’une immense partie de mon temps de travail consistait à écrire rapport sur rapport, alors que ce dont j’avais envie, c’était de sortir du bureau pour aller coordonner les activités directement depuis le terrain.
Il m’a donc rapidement fallu apprendre à déléguer, et comprendre l’importance d’accompagner l’autonomie et développer les responsabilités des personnes de mon département, afin que le plus tôt possible, la présence d’un travailleur expatrié ne soit plus indispensable.
Les jours passaient, et je dois avouer que je me sentais de plus en plus à l’aise dans mon travail et sur ce lieu de mission. Jusqu’à ma première tourista.
Et malgré la discipline avec laquelle je me suis appliqué à prendre ma prophylaxie, il aurait été surprenant que je n’attrape pas au moins une fois le paludisme.
Déçu, j’ai donc arrêté de prendre cette prophylaxie qui m’abimait plus le foie qu’autre chose. Et c’est comme ça que j’ai attrapé le paludisme une seconde fois…
Au milieu de ma mission, j’ai été amené à faire face à ma première confrontation avec la diplomatie humanitaire a.k.a la pire déception. Pour résumer, nos activités nous avaient permis de récolter des informations avec données à l’appui selon lesquelles une communauté était clairement en train de mourir de faim. Après avoir fait remonter cette information au bureau des Nations Unies en capitale, il nous a été répondu qu’il valait mieux attendre encore un peu, pour voir comment la crise se développe – ou s’arrête – afin de ne pas s’attirer les foudres du gouvernement, avec qui les Nations Unies étaient quelque peu en disgrâce à ce moment-là.
En attendant, des gens étaient en danger de mort pendant que d’autres se faisaient caresser dans le sens du poil. Après une telle déconvenue, on est vite tenté de perdre courage…
Néanmoins l’implication de mon équipe me donnait chaque matin toute l’énergie dont j’avais besoin pour commencer la journée et effectuer les tâches qui m’avaient été confiées, dans l’intérêt des communautés les plus vulnérables.
Ça n’a pas toujours été simple, mais ce fabuleux travail d’équipe nous a non seulement permis de rattraper le retard sur le projet qui avait débuté deux mois avant mon arrivée, mais aussi de préparer à temps le second projet.
Malgré la déception ressentie plusieurs semaines avant, notre détermination à porter assistance aux communautés a fini par payer lorsque celles-ci ont commencer à récolter les céréales obtenues des semences que nous avions distribuées.
Très vite, nous avons été témoin d’un effet « boule de neige », lorsque le marché local a rouvert. Non seulement les personnes que nous avions aidées avait de quoi se nourrir, mais leurs récoltes leur permettaient aussi d’en revendre une partie, afin d’obtenir de l’argent pour répondre à d’autres besoins.
Et puis plus vite que ce que j’aurais initialement imaginé, la fin de ma mission est arrivée. Le plus dur à ce moment-là aura été de surmonter l’émotion suscitée par les au revoir adressés aux membres de mon équipe, avec lesquels j’ai tissé de vrais liens d’affection renforcés par notre engagement et les efforts qui auront été collectivement faits dans l’intérêt des personnes en situation de vulnérabilité. Mais comme on dit, toutes les bonnes choses ont une fin, et après un repos bien mérité, le temps de la seconde mission et des suivantes est bien vite arrivé !
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